Une nouvelle :


Midi moins dix. D’un pas pressé, Nathalie franchit le perron, les bras chargés de sacs à provisions. Le sac à main en bandoulière, elle pose ses paquets et sort à la hâte ses clefs.
Les bouteilles d’eau minérale sont encore dans la voiture : Elles attendront.
Tout en approchant ses clefs de la serrure, elle pense à ses enfants. Elle sera la dernière, une fois de plus, à l’école pour les récupérer.
Elle s’apprête à glisser sa clef dans la serrure : Impossible. Elle essaye dans l’autre sens : rien. Elle regarde ses clefs. Ce sont pourtant bien les bonnes avec une légère encoche sur l’une des face. Elle force un peu plus. La clef ne rentre toujours pas. Elle la titille comme elle sait le faire : Rien. Les serrures connaissent bien le doigté de leur maître qui s’en vont et s’en viennent si souvent. D’autant plus lorsqu’elles ne rajeunissent pas. Mais en vain. Elle s’énerve, tempête, piétine regarde dans le trou s’il n’y a pas quelque chose qui coince. Rien ! Elle sort ses autres clefs. Mais non, elles n’ont rien à voir avec cette serrure ! Que se passe-t-il ? Elle appuie fort sur la poignée, pousse la porte de son épaule dès fois qu’elle ne soit pas fermée à clef. RIEN ne bouge, sinon qu’elle a l’épaule douloureuse.
Elle se met à genou, regarde dans le trou. Bizarre. Il n’est plus comme avant. Et puis le tour est luisant, comme neuf. Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Que faire ?
Elle tourne en rond, l’aiguille des minutes aussi. Elle est en retard. Elle n’en peu plus, transpire, sous ce soleil de juin, déchirée entre la porte qui résiste à toute sollicitations, les enfants qui l’attendent, le beurre qui fond, les surgelés qui dégèlent et l’eau qui chauffe. Sa montre n’arrête pas d’avancer. La sonnerie de l’école doit avoir expirée depuis le temps qu’elle trifouille sa serrure. Plus une minute à perdre. Elle s’élance, laissant en vrac ses provisions pour retrouver ses petits.
A peine le temps de leur dire bonjour qu’au pas de course elle les traîne jusqu’à la maison. Pas bien avancée la Nathalie, devant sa porte close. Elle à qui en temps normal, rien ne résiste. Les enfants, essoufflés, se regardent l’un l’autre avec un petit sourire aux coins des lèvres.
Elle se plante à nouveau devant la porte, perplexe, regarde ses surgelés et tente un ultime essai avec la clef de cette fameuse serrure.
Que peut-elle faire d’autre. Elle n’a pas de portable. Les voisins sont partis en weekend. Il n’y a pas un chat dans la rue.

Quand soudain, à peine effleurée la serrure, la porte s’ouvre, comme par miracle, sans grincer, sans couiner, sans hésiter, sans broncher, quant à son habitude. Les enfants éclatent de rire, muets devant la scène qui se déroule sous leurs yeux. Une petite musique s’élève de l’intérieur. Des bras sortent de l’ombre élevant un gros gâteau, illuminé de bougies. C’est son compagnon qui porte le gâteau. Toute la famille est maintenant autour d’elle.
Son père la prend dans ses bras et chacun entonne : « Joyeux anniversaire Nathalie ».
Enfin, il lui offre une toute petite clef et une boîte en bois. Mais qu’a-t-il donc mis, sous clef, de si précieux ? Elle s’empresse de tourner la clef dans la petite serrure qui, elle, fonctionne à merveille.

Elle découvre alors une vieille serrure. Mais à y regarder de plus près c’est son ancienne serrure ; Elle éclate de joie. Elle avait tant de fois demandé à son père de lui changer la serrure, lui, qui, de métier, était serrurier. Et le jour de gloire venait d’arriver. En cachette, il avait changé la serrure. Il lui tendait la nouvelle clef…alors qu’elle avait soufflé ses bougies !

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