chronique : Un œuf par jour.

Chronique - Un œuf par jour !
On a souvent besoin d’un plus petit que soi, disait ce grand maître: Jean de La Fontaine. Mais aujourd’hui, pour varier, je vais vous parler des grosses bêtes qui « mangent » les petites ! Cela nous changera de ces filous de virus qui jouent à cache-cache entre les mailles du filet et qui nous ouvriront sûrement à des découvertes d’un autre ordre !
Premier épisode
Il était une fois deux poules qui picoraient dans leur parc-filet-nylon, filet mignon, et qui en échange de bons et loyaux services me pondaient deux œufs par jour, sauf omission de l’une ou de l’autre et dont, bien sûr, elles étaient pardonnées.
On a le droit de souffler, même chez les poules !
Le printemps chantait à tue-tête. Les petits-enfants se régalaient de tartines de confitures. Quand, prise par je ne sais quel besoin irrépressible, je quitte la table et me dirige vers l’enclos des poules. Et voilà que je me trouve face à face, avec un magnifique renard – il faut le dire - au poil brillant, roux, blanc et beige…
Surpris l’un et l’autre, nous nous regardons droit dans les yeux. Aussitôt il lâche sa proie maintenue de ses crocs acérés, à travers le filet-nylon. Le « rusé » renard pensait décamper avec ma poule ! Que nenni, il a détalé plus vite que son ombre en me voyant foncer vers lui, incapable de sortir du parc le cadavre de ma poule!
Snif !

Deuxième épisode
Après quelques jours d’adaptation, ancienne et nouvelle poule font bon ménage.
L’automne arrive. Les feuilles du noyer tombent, ce qui est prévisible, laissant le parc à l’air libre et les poules à découvert !
Mais la vie n’est jamais comme on croit et pourtant…
Une nuit, un rêve surgit, à jeun que j’étais, et me conte aventure. « Un personnage, râblé, trapus, avec de grands et larges bras tire violemment sur la housse de couette suspendue au fil à linge, à quelques mètres du poulailler. Il file, alors que je me dirige vers lui. »
Le lendemain matin, je sors de la maison et que vois-je ? Une buse qui s’attaque à l’une des poules ! Je ne fais ni une ni deux et approche au pas de course. La buse, surprise, lâche sa proie et s’envole à tire d’aile ! Comme dans le rêve !
Je me précipite vers ma poule. Elle n’est pas morte. Ouf ! Je la prends dans mes bras, soulève délicatement son aile et vois une plaie de dix centimètres, le long de ses côtes. Il n’y a pas de sang, sinon une goutte près de son œil. Ne sachant que faire tant la poule est effrayée et moi avec, je la pose délicatement dans le foin au fond du poulailler et lui laisse de l’eau et quelques graines. Je n’ai vu que cette terrible blessure.
Je demande conseil à un ami, qui me dit : « - Elle doit souffrir ! Mets donc la cocotte à la cocotte ! » Moi qui avait décidée de garder les poules tout l’hiver.
Snif ! snif !
Me voilà tiraillée. Je décide d’attendre le lendemain. Au matin, je découvre qu’elle avait mis sa gamelle sous elle pour pondre son œuf. Elle se tenait debout sur une patte, appuyée contre le mur. Quelle énergie de vie !
Souffre-t-elle ? Que sait-on de la souffrance des animaux ? Déjà que pour l’homme ce n’est pas si simple. Cela m’amène à la question suivante : Les poules ont-elles un imaginaire ? Pour les objets, la question de l’âme s’est posée du temps de Lamartine. Alors allez donc savoir !
Mon expérience de souffrances variées, m’a permis de découvrir que l’imaginaire contribuait beaucoup à la peur et donc à la douleur. Ça rime en plus !
Je peux vous l’affirmer : vivre le présent et donc vivre ses douleurs, laisse moins de place à l’imaginaire, ce roi des scénario catastrophes, et la douleur s’apaise, pour une part.
Voyant ma poule à l’écoute de ce qui me semble tolérable pour elle, je décide de la laisser se remettre seule de ses maux. Peu à peu, elle se déplace sur son unique patte, sans appui, s’entraîne pour les jeux Olympiques en montant à l’échelle de poule, saute
quatre vingt centimètres de haut « à pied joint » et sort de plus en plus dans le parc « à
cloche-patte », si je peux dire. Je pense que son aile est aussi endommagée.
Qui a dit qu’elle ne passerait pas l’hiver ? Les beaux jours sont là.
La poule se sert peu à peu de son autre patte comme béquille. Mais elle ne peut s’appuyer sur ses ergots ! Elle connaît ses limites ! A-t-elle souffert ?
Et la voilà même qui recommence à pondre : Incroyable mais vrai !

Troisième épisode
Un de mes voisins a gardé deux chiots, déjà grands, d’une portée de terrier de Boston.
Ils s’échappent régulièrement de leur parc fait de bric et de broc très inefficace.
Je lui ai répété de faire en sorte que ses chiens ne viennent pas rôder chez moi.
Un matin, après avoir fait un cauchemar durant la nuit, un avertissement peut-être, dont je ne tiens pas compte, j’hésite à rentrer mes poules, devant m’absenter une heure.
Je ne le fais pas.
A mon retour, la plus vaillante des poules s’est réfugiée sur une étagère.
Ma poule, la rescapée de la buse, gît morte, dans le parc défoncé par les chiens.
Snif ! snif ! snif !

Après avoir surmonté tous ses malheurs de l’automne, je suis très triste de retrouver ma poule morte à cause de ces chiots qui voulaient jouer !
Pourquoi le destin s’est-il acharné sur elle ?
Je remercie cette poule pour sa belle leçon de vie.
Elle y a laissé des plumes, sans même sortir du poulailler ! Les confinés du virus y laisseront sûrement des plumes ou un apprenti--sage ?
J’ai constaté qu’à l’écoute de ses sensations, ma poule a pu se remettre d’une façon
incroyable de ses blessures !
Que ce soit la nature ou notre corps, si on sait les écouter, ils peuvent nous ouvrir des portes pour vivre mieux, pour rester en vie, pour guérir autrement !
C’est aussi un temps pour mieux nous écouter, et rester à l’écoute de nos sensations et intuitions. Ces dernières connaissent souvent mieux que quiconque et que notre mental, le bon chemin.
Rêves et cauchemars sont parfois des avertissements. Les hésitations aussi.

Quatrième Episode :
Une de plus : Une buse à encore sévit ! Elle est passée entre les mailles des fils tendus de part en part de l’enclos à la suite de la première attaque.
Une de moins : La compagne de l‘éclopée, celle qui avait été tuée par les chiens !
Snif ! snif ! snif ! snif !
Pâques est arrivée, la jeune remplaçante de la précédente, ne pond pas encore
et les œufs en chocolat n’ont pas été livrés. Les cloches sont confinées !
Le nouveau Blockhaus à poules est en voix de construction.
Qui écrit le destin avec ou sans plume ? Poule ou coq ? (C‘est un jeu d’enfant)

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